Paroisse Notre-Dame de l'Eau Vive

Homélie de Mgr Jean-Charles Dufour du 21 mars 2010


5e dimanche du Carême -  Développement et Paix 

Ça fait longtemps que je ne vous ai pas raconté une petite histoire !

« Il y avait une fois deux frères !  L’un était célibataire et l’autre marié !  ils  possédaient une ferme dont le sol fertile produisait du grain en abondance. Un moitié du grain allait à l’un des frères et une moitié à l’autre.  Au début, tout allait bien.  Puis, de temps à autre, celui qui était marié commença à s’éveiller en sursaut au cours de la nuit et à penser :  « C’est pas juste.  Mon frère n’est pas marié et il reçoit la moitié du produit de la ferme.  Moi, j’ai une femme et cinq enfants, et j’ai toute la sécurité dont j’ai besoin pour mes vieux jours.  Mais qui prendra soin de mon pauvre frère, quand il vieillira?  Il lui faut épargner pour l’avenir beaucoup plus qu’il ne le fait actuellement.  Ses besoins sont manifestement plus grands que les miens. »

Sur ces pensées, il sortait du lit, se glissait furtivement chez son frère et déposait un plein sac de grain dans la réserve de celui-ci

Le célibataire commença lui aussi à subir des attaques nocturnes semblables.  De temps à autre, il était tiré de son sommeil et se disait à lui même :  « C’est tout simplement pas juste.  Mon frère a une femme et cinq enfants et il reçoit la moitié du produit de la terre.  Moi, je n’ai que moi-même à soutenir.  Alors, est-il juste que mon pauvre frère, dont les besoins sont manifestement plus grands que les miens, reçoive exactement la même chose que moi? »  Puis, il quittait son lit et déposait un plein sac de grain dans la réserve de son frère.

Un jour, ils se levèrent du lit en même temps et se retrouvèrent face à face, un sac de grain sur le dos.

Nombre d’années plus tard, après la mort des deux frères, l’histoire se fit jour.  Aussi, quand les gens de cette ville voulurent construire une église, ils choisirent l’endroit où les deux frères s’étaient rencontrés, parce qu’ils ne pouvaient pas imaginer un endroit plus saint que celui-là. »

C’est le contraire de l’Évangile de dimanche dernier qui nous racontait la parabole de l’enfant prodigue.   Il y avait deux frères aussi !  Le plus jeune qui demande sa part d’héritage avant le temps…  On ne peut pas dire que c’est l’amour qui dominait dans  son cœur.   Demander sa part d’héritage avant le temps !  aussi bien dire à son père :  « J’aimerais autant que tu sois déjà mort ! »   Mais « le père fit le partage de ses biens ».   Et puis, à la fin de l’évangile, on a vu le plus vieux  plein de ressentiment et de rancune !    et le Père de lui répondre :  « Toi, tu es toujours avec moi… et tout ce qui est à moi est à toi. »   Même sens du partage !

On ne peut pas dire que les deux frères de l’évangile avaient le sens du partage !  

 

 Mais, on peut dire de ceux de mon histoire qu’ils avaient un cœur semblable à celui du père de l’évangile.

Il est bien clair que Jésus nous invite au partage !   Déjà, le mercredi des cendres,  il nous invitait à prier, à jeûner, à partager, pas pour se faire remarquer des autres, mais en secret.  Et aujourd’hui, en ce 5e dimanche du Carême,  comme à chaque année,  nous sommes invités  à poser un geste de partage dans le cadre de la campagne de Développement et Paix, en faveur de nos frères et sœurs du Tiers-Monde.

Tantôt, dans la 1e lecture, Dieu disait, par la bouche d’Isaïe :  « Voici que je fais un monde nouveau…  je vais faire passer une route dans le désert… j’aurai fait couler de l’eau pour désaltérer mon peuple.   C’est ça le sens de notre geste de partage :  actualiser la Parole de Dieu,  contribuer à construire un monde nouveau !

Dans la 2e lecture,  St-Paul nous disait :  « J’ai moi-même été saisi par le Christ Jésus… et un peu plus loin « mais, moi, je ne pense pas l’avoir déjà saisi…  je cours vers le but… »   Notre geste de partage veut traduire le fait que nous avons été saisi par le Christ,  par son Évangile,  que nous sommes encore en marche,  et que nous courons pour le saisir encore plus nous aussi.

A la fin de ma petite histoire, on disait « quand les gens de cette ville voulurent construire une église, ils choisirent l’endroit où les deux frères s’étaient rencontrés, parce qu’ils ne pouvaient pas imaginer un endroit plus saint que celui-là. »   Par notre geste de partage, nous pouvons signifier qu’il y a ici une vrai Église,  pas une église avec un petit « e »,  mais une vraie communauté qui donne un témoignage de sainteté.

Dans l’Évangile, on dit deux fois que Jésus traçait des traits sur le sol pendant qu’on cherchait à accuser une femme et  qu’on insistait pour l’interroger.  En racontant ce fait,  quelqu’un disait que le vent qui soufflait sur le sable avait effacé la plus belle lettre d’amour qui n’ait jamais été écrite !   Conscient de l’amour de Dieu pour chacun et chacune d’entre nous,  nous sommes invités à notre tour,  à faire en sorte que notre geste de partage soit comme une belle lettre d’amour aux démunis du Tiers-Monde.

Nous sommes là pour célébrer l’eucharistie.  « Jésus prit du pain,  il le rompit et le leur donna…  il prit la coupe et la donna à ses disciples. »   Deux gestes de partage.   Derrière le pain et le vin,  nous comprenons que c’est sa vie que Jésus partage,   c’est toute sa personne qu’il donne pour nous faire vivre.   Que notre geste de partage  manifeste concrètement le partage de Jésus,  qu’il soit un signe de l’Eucharistie que nous célébrons ensemble.

J’invite Rachel à venir vous dire quelques mots.